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Approche systémique stratégique

Le systémicien, nouveau démineur de conflits en entreprise


Le temps, c’est de l’argent. La perte pour les entreprises de l’Hexagone est estimée à l’équivalent d’un mois de travail par an, soit une facture de plus de 152 milliards d’euros. Ainsi, la résolution des conflits dans un cadre professionnel représente un enjeu économique autant que social.

 

Lors de la webconférence organisée le 1er mars dernier par l’ANDRH Pays de l’Adour sur le thème de l’efficacité de l’approche systémique dans la résolution de conflit :

  • Plus de 66% des DRH et RRH présents ont déclaré consacrer un temps important à la prévention de situations complexes et à la résolution de conflits.
  • Confrontés à une situation conflictuelle au sein de leur entreprise, 55% des participants optent naturellement pour un mode de résolution en interne (par exemple en s’entretenant avec les différentes parties prenantes).
  • Cependant, 48% d’entre eux avouent ne pas savoir comment se positionner, habités par la crainte de devoir prendre parti, d’arbitrer et de manquer alors d’impartialité dans l’analyse qu’ils font de la situation.

Pour prendre en charge ces tensions, les entreprises ont aujourd’hui généralement recours à la médecine du travail, à des médiateurs, des coachs, des juristes ou des organisations syndicales. Autant d’acteurs – particulièrement la médecine du travail –, qui sont généralement démunis face à des situations à la croisée de la santé individuelle et du bien-être collectif. La seule réponse est trop souvent l’arrêt de travail, le licenciement ou la mutation. Mais il existe une autre approche, encore méconnue, bien que particulièrement efficace : l’intervention d’un systémicien.

 

Des situations qui se sont « dégonflées d’elles-mêmes »

De quoi s’agit-il ? L’approche dite systémique est issue de l’école de pensée de Palo Alto, en Californie. Une théorie des sciences de la communication qui consiste à aborder les conflits entre personnes comme un dysfonctionnement du système de relations qu’un individu entretient avec lui-même, avec les autres, et avec le monde. Pour parler simplement, le systémicien est un expert des dynamiques relationnelles et de leur régulation.

Un exemple – réel – permet de comprendre comment il procède. Magali*, 35 ans, travaille dans une entreprise de presse. Elle dirige deux personnes, dans un contexte tendu de transformation digitale. Plus elle se sent en difficulté, plus elle consacre d’énergie à se montrer irréprochable, notamment en planifiant à l’extrême les tâches de son service. « Je finis par me dire que je suis trop exigeante », s’inquiète-t-elle. De fait, ses collaboratrices lui reprochent de ne pas tenir compte de leurs difficultés personnelles.

C’est dans ce contexte que sa N + 1 est affectée à une autre mission. Magali se retrouve alors en prise directe avec Édouard, son N + 2. Celui-ci reçoit les plaintes des subordonnées de Magali et reproche publiquement à cette dernière ses insuffisances managériales. Magali vit ces reproches comme une injustice. Plus elle cherche à se justifier, plus Édouard s’emporte et plus elle-même ressent colère et peur de ne plus être à la hauteur.


PHASE N°1 : Définir le problÈme

C’est la DRH, saisie de la question, qui a adressé Magali à une systémicienne. Les premières séances permettent la « délimitation » du problème. L’intervenante cerne les difficultés de sa cliente (son besoin de tout contrôler et de viser la perfection afin de « fermer la porte » aux reproches de son management et être inattaquable).

Magali met en place ce que les systémiciens appellent des « tentatives de solution », des stratégies qui aggravent et enkystent le conflit au lieu de le résoudre. Ainsi, elle prépare son argumentation avant de rencontrer son manager, se plaçant sur la défensive. Avec ses collaboratrices, elle évite à tout prix d’aller sur le terrain émotionnel, quitte à s’isoler.

PHASE N°2 : EXPÉRIMENTER

L’intervenante va lui proposer des stratégies alternatives, souvent paradoxales. Par exemple, avec Édouard, la « technique du pare-choc » : commencer une intervention par « Je sais que je vais vous décevoir, mais… », pour désamorcer les reproches redoutés

PHASE N°3 : AJUSTER

Enfin, le travail s’achève par un « ajustement » de la stratégie en fonction des résultats de l’expérimentation.

Lors de sa dernière séance, l’intervenante propose à sa cliente un questionnaire d’évaluation. Sur une échelle de 0 à 10, pour Magali, le problème est résolu à hauteur de 8. Le coaching de Magali aura duré neuf séances sur un an.

 

« Le coeur a ses raisons… »

 

Notre recherche, menée sur une population de 357 clients du réseau SYPRENE/LACT sur les pratiques pour les thérapeutes et les chercheurs en stratégie et en systémique, montre une moyenne de six séances sur 6 mois. Avec une efficacité notable : résolution du problème ou amélioration tangible dans 88 % des cas. De manière générale, les interventions correspondent à trois types de difficultés :

 

  • des problématiques de conduite du changement (perte de sens, démotivation),
  • de souffrance au travail (burn-out, harcèlement, dépression)
  • de crise (grèves, menaces de tentatives de suicide).

L’approche systémique stratégique est particulièrement indiquée pour dénouer des conflits enkystés au fil du temps, où l’émotionnel a pris le dessus sur le rationnel.

Les entreprises peuvent d’ores et déjà ajouter un outil performant à leur dispositif d’amélioration de la qualité de vie au travail, indépendamment de la médiation et des plates-formes d’écoute téléphonique. Un nouvel outil de résolution des problèmes, nous l’avons dit. Mais aussi un outil de prévention, avec la mise en place de formations/interventions sur le management relationnel (à partir de modules collectifs de 2 heures) appliqué aux sujets sensibles de l’entreprise par exemple la discrimination, la gestion de conflits, le télétravail… Un outil, de surcroît, qui permet d’impliquer, lorsque c’est nécessaire, l’ensemble des parties prenantes : direction, management, médecine du travail, syndicats. Une saine gestion des ressources humaines peut-elle se passer d’un tel atout ?

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